Phase VI – MES CATASTROPHES DE 1994
Chap. 2 : 6 AVRIL 1994, LA TRAGEDIE DU RWANDA
Pages 105 à 107 : Deuxième partie (Fin)

… Notons que le campus de Mudende se trouvait dans la région de Gisenyi, une ville rwandaise frontalière à celle de Goma. Les deux villes sont pratiquement face à face, seuls deux petits postes de police les séparent avec une zone appelée, Zone Tampon, zone neutre. Cette ville avait un aéroport où pouvaient décoller des vols internationaux. Et comme il fallait s’y attendre au lendemain, parce que le temps pressait, tous les ressortissants européens, américains et africains de l’ouest devaient quitter immédiatement le campus pour raison de sécurité et de vie. Il nous avait été dit de ne prendre que l’essentiel des effets et surtout les documents de voyage. En d’autres termes, il fallait tout abandonner et quitter immédiatement le pays…

… J’avais beaucoup de choses dans le placard et tiroirs en plus de mes effets académiques : mes beaux habits fraichement ramenés de la Suède et du Danemark, mon chéquier, mes photos,  …. Que devrais-je prendre et que devrais-je laisser ? Et d’ailleurs, comment je pouvais rentrer dans mon pays, le Gabon, sans ma fiancée ? J’avais tout de même rassemblé quelques effets dans un petit sac prit à la va-vite et les documents de voyage, les documents de base académique dont mes notes, ….

… Or, le moment de partir avait sonné. Notre convoi était escorté par des véhicules militaires pour notre sécurité jusqu’à la frontière avec le Zaïre, RDC. Presque tout le monde était à bord de véhicules, excepté un étudiant, le Fils du Mvett…

… J’étas là debout, sans vouloir monter dans le bus. Puis mes amis m’appelaient pour partir sinon le convoi devrait me laisser. Je refusais de monter car j’étais en larmes en disant à qui voulait l’entendre, même en présence de mes anciennes amies, que je ne pouvais partir dans mon pays sans Marie Jo à mes cotés. Où est ma Marie Jo? M’exclamais-je. Le bus amorçant alors le départ, malgré les douleurs et la fissure de mon cœur, j’étais donc obligé de courrir pour monter en toutes larmes. Puis le convoi conduisant le Fils du Mvett s’était engagé en direction de la ville frontalière de Goma…

…Devant ceertaines de mes anciennes amies et cela ne me dérangeait pas. Je n’avais pas de ces nouvelles peut être qu’elle aurait aussi succombé. Certaines personnes riaient, d’autres souriaient de voir le visage d’un homme précédemment si heureux devenir brusquement malheureux parce qu’il cherchait sa fiancée. Je n’avais pas honte de m’exprimer ainsi tellement ma douleur était intense au fond de moi en pensant que j’étais aussi en train de perdre la femme de ma vie…

… C’était très atroce, le monde était si injuste avec moi, disais-je. Ce que personne ne pouvait savoir clairement, c’était que je me voyais en un homme complètement fini qui retournait auprès de ces sorciers qui m’attendaient sans le résultat de ce qui allait les surprendre : une femme venant du pays de 1000 collines. Je pensais être unique dans toute ma famille de réaliser un tel gain puisque personne d’autre n’avait épousé une étrangère. Le Fils du Mvett n’avait donc pas de choix car le bus foncait à toute allure vers la frontière pour le remettre dans son pays d’origine, le Gabon…

… Durant tout ce parcours aérien de plusieurs heures et plusieurs escales, à Nairobi et Douala, je ne cessais de fondre en larmes. Je me plaignais intérieurement auprès de Dieu de m’avoir abandonné brusquement de la sorte et sans raison alors qu’il m’avait fait voir Sa gloire par ces deux formations universitaires et la rencontre de cette fille…